La production de poterie de l'époque gallo-romaine à l'époque contemporaine


Cécile Bébien, Fabrice Couvin, Philippe Husi

La période gallo-romaine.

Le Haut-Empire (de la fin du 1er s. av. à la fin du 3e s. ap. J.-C.) : l'adoption du répertoire italique (F. Couvin)

Alors que sa fabrication était restée majoritairement du ressort domestique, la période de La Tène finale correspond, dans le domaine de la céramique, à la mise en place de structures de production spécialisées. Si aucun atelier n'a été clairement identifié pour cette période en Indre-et-Loire, la fréquence des découvertes de vases fumigés à décor estampé sur le site des Châtelliers à Amboise suggère une production aux environs du dernier quart du 1er s. av. notre ère (CRIBELLIER et al. 2005 : 341-342).

À partir des dernières décennies du 1er s. av. notre ère, on assiste chez les Turons, comme dans l'ensemble du nord de la Gaule, à la diversification du répertoire avec l'adoption de formes d'origine méditerranéenne. Cette modification s'accompagne de progrès techniques, comme l'utilisation systématique du tour rapide et la conduite de cuissons maîtrisées (oxydante ou réductrice) dans des fours à deux volumes.

Une majorité des sites de production de cette période (carte 1) nous est connue par des découvertes anciennes, recensées par A. Ferdière (FERDIERE 1975). Parmi celles-ci, on peut retenir les indices les plus probants, avec entre autres Avon-les-Roches, Loches, Joué-lès-Tours, Tours et Villedômer.

Mais trois sites dominent surtout. L'oppidum d'Amboise livre, pour les 1er et 2e s., des vestiges de fours dont les ratés de cuisson n'ont pas été étudiés. Seules les céramiques des officines de Crouzilles-Mougon, dans la vallée de la Vienne, et de Thésée-Pouillé, dans celle du Cher, sont mieux connus (DEBAL, PEYRARD 1985 : 41 ; CHAMPAGNE, COUVIN 1996 ; SCHWEITZ et al. 1986 ; TROMBETTA 1982). D'autres ateliers proches ont pu tirer profit de leur situation sur des axes fluviaux pour diffuser leurs produits en territoire turon. C'est le cas de Gièvres, plus à l'est dans la vallée du Cher, et de Naintré dans la vallée de la Vienne (AMELIN, CHARTRAIN 1991 ; BELLIARD et al. 2002).

Au Haut-Empire, le répertoire turon se caractérise par la prédominance des céramiques fines de La Graufesenque (sigillées du Sud de la Gaule), auxquelles succèdent celles du Centre de la Gaule. Si le registre de la céramique commune se rattache plus largement à celui de la Loire moyenne, il est fortement teinté par l'influence des productions du nord du Poitou (COUVIN 2005).

Le Bas-Empire : absence d'ateliers connus (C. Bébien)

A la fois héritière du Haut-Empire et annonciatrice de changements, la céramique de cette période, encore mal connue dans la zone géographique considérée, est essentiellement documentée grâce aux fouilles de Tours. Aucun atelier du Bas-Empire n'est connu mais les productions présentes pour cette période témoignent d'un dynamisme économique important : au 4e siècle, le répertoire des formes et les productions s'inscrivent dans un faciès plus large, comme en témoigne par exemple la céramique à engobe brun-rouge brossé, présente d'Angers à Bourges et à l'Orléanais (MORERA, MORTREAU 1997 ; CHAMBON, ROUQUET 1999). De même, la présence de céramique à l'éponge, originaire du Poitou, de sigillée d'Argonne puis, au 5e siècle, de la céramique dite Dérivée de Sigillée Paléochrétienne (DSP) et de productions régionales apparentées, à décor estampé, implique le rattachement du répertoire turon à un faciès culturel plus large.

Le Moyen Age et l'époque moderne (P. Husi)

Du 6e au 12e s. : aucun atelier découvert.

Une analyse fine du mobilier céramique découvert en fouille montre que le territoire de l'actuelle Indre-et-Loire est, durant cette période, surtout à partir du 8e s., pleinement intégré aux réseaux économiques du nord-ouest européen. Pour preuve, on retiendra sa participation à la transmission de savoirs techniques, peut-être même à certaines innovations, si l'on se réfère à la précocité de la céramique glaçurée observée à Tours dès le 8e s., technique qui ne se généralise pas avant le 10e et surtout le 11e s. dans ce vaste espace (RANDOIN 1981 ; HUSI 2005 ; 2006)

Du 13e au 17e s. : quelques ateliers attestés par l'archéologie (carte 2)

Du 13e au milieu du 15e s., la tradition de fabrication de la terre cuite en Touraine est proche de celles du Berry, du Maine et de l'Anjou ; elle s'oppose régionalement à un espace nord-est, incluant le Blésois et l'Orléanais, dont le mobilier est plus proche de celui de l'Ile-de-France. Les rares éléments exogènes traduisent un rayonnement centré sur l'ouest du bassin de la Loire moyenne, sûrement hors des grands réseaux d'échanges de l'époque. Le seul atelier recensé pour cette période, à Amboise, reflète bien le vaisselier régional du 14e s..

A partir de la fin du 15e s., la production en Touraine n'est attestée que par deux ateliers à Tours, dont les récipients correspondent non seulement au vaisselier d'usage courant, mais aussi à certains exemplaires décorés. Les importations sont presque exclusivement des récipients en grès - terme qui désigne une pâte cuite à très haute température (environ 1200°), partiellement vitrifiée - provenant du Beauvaisis, de Puisaye ou du Berry (La Borne), ces derniers restant encore marginaux avant le 17e s. Les pots utilisés comme contenants sont en grès et proviennent des ateliers du Domfrontais, ou en terre cuite et produits aux environs de Laval. Les recherches récentes ont montré que tous ces pots sont les témoins indirects du commerce du beurre breton et normand, qui inonde l'Ouest de la France durant la période moderne (GALINIÉ, SCHWEITZ 1974).

A partir du 18e s. : Les faïenceries. (carte 2)

La fabrication de faïence est attestée en Touraine par de nombreux ateliers :

- d'abord à Saint-Christophe-sur-le-Nais, avec les premières faïenceries attestées dès 1730 ;

- ensuite à proximité de Tours, sur la commune de Saint-Pierre-des-Corps à partir de 1745, avec les productions de pièces de « caillou » dites aussi « culs noirs », puis au 19e s., pour ne citer que le plus connu, les ateliers de Charles-Jean Avisseau ;

- sans oublier les ateliers de Langeais, à partir de 1839, avec un fort développement durant la deuxième moitié du 19e s. ;

- enfin, sur la commune de Sainte-Radegonde, proche de Tours, la manufacture de faïence et de porcelaine en activité de la fin du 19e s. au début des années 1960 (BOSSEBOEUF 1892 ; LA CERAMIQUE... 2004).

Voir aussi :
- L'artisanat antique durant le Haut Empire (1er-3e s.)

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