L'habitat néolithique de la Touraine est encore fort mal défini aujourd'hui. Les habitats les plus anciennement connus ont été détectés par prospections pédestres et ont fait l'objet de ramassages de surface (Esvres «la Haute Cour», GUÉRINEAU et BASTIEN 1990). Parfois des fouilles ont été occasionnées par des aménagements divers mais elles ont toujours été de faible ampleur (Abilly «La Borne», CAUVIN 1961 ; Le Grand-Pressigny «Les Réaux», CORDIER 1961).
Les fouilles programmées d'habitats néolithiques sont pratiquement inexistantes en Touraine (VILLES 2007a, b et c). Les sites récemment mis en évidence l'ont été à l'occasion de fouilles préventives, menées lors d'exploitations de sables ou d'aménagements autoroutiers (carte 1).
Il est à noter que les diagnostics systématiques réalisés préalablement à tout aménagement dans le secteur du Grand-Pressigny (communes d'Abilly, Barrou, Chambon, Chaumussay, Le Grand-Pressigny et La Guerche), en application d'un arrêté préfectoral pris au titre du décret 2004-490 (3 juin 2004), n'ont pas encore permis de mettre au jour des habitats contemporains des ateliers de taille du silex de la fin du Néolithique ou antérieurs.
Les habitats néolithiques peuvent être identifiés par l'existence de structures caractéristiques, tels des fossés associés ou non à des palissades et délimitant un espace collectif plus ou moins grand. On en connaît de rares exemples en Touraine, dont le plus spectaculaire est l'enceinte du «Grand Ormeau» à Sublaines, datée entre 4800 et 4500 avant notre ère (FRÉNÉE 2008; FRÉNÉE 2014) (carte 3). Sur la rive gauche de la Creuse, l'enceinte de «La Croix» à Leugny (Vienne), repérée par photographie aérienne et récemment explorée (ARD et LOUBOUTIN, 2008), se rattache aux enceintes régionales du Néolithique récent/final malgré la rareté du matériel. Les éperons naturels barrés d'un rempart de pierre ou de terre font leur apparition au Néolithique moyen, vers 4500 avant notre ère (carte 3). Les «Châtelliers» d'Amboise (CORDIER 1995, IRRIBARRIA 2006) en sont un bel exemple tandis que l'éperon «Murat» à Ferrière-Larçon (CORDIER et MONTROT 1954) demande à être exploré avant de pouvoir être sans conteste attribué au Néolithique.
La présence de bâtiments au plan stéréotypé peut également être caractéristique, telles les maisons danubiennes de la moitié nord de la France, les maisons de plan circulaire du Néolithique moyen dans le Bassin parisien ou les très grandes maisons également sur poteaux plantés de la fin du Néolithique en Bretagne, Poitou-Charentes et Aquitaine. Mais, si l'on connaît autour de la Touraine de tels plans de maisons, avec la maison de tradition danubienne de Pezou (Loir-et-Cher, LEROY et LECOEUVRE 2006), le bâtiment circulaire du Néolithique moyen d'Auneau (Eure-et-Loir, AGOGUÉ, DUBOIS, VERJUX 2007) ou les maisons de plan rectangulaire de la fin du Néolithique à Beaumont (Vienne, LOUBOUTIN et al. 1997 et 1998) et à Moulins-sur-Céphons (Indre, HAMON 2007 ; KRAUSZ et HAMON 2007), les propositions de plans qui ont été faites pour la Touraine, tant aux «Sables de Mareuil» à Ligueil (document 8) (VILLES 1999) qu'au «Petit-Paulmy» à Abilly (MARQUET et MILLET-RICHARD 1995), n'emportent pas une adhésion sans réserve.
Hormis ces aménagements lourds, certaines structures en creux, trous de poteau, silos et surtout fosses d'extraction d'argile réutilisées en dépotoirs, signent une occupation domestique. L'identification d'un habitat repose alors sur la variété des vestiges associés, vases en terre cuite cassés, outils en silex taillé, en os ou bois de cervidé, haches polies en silex ou roches tenaces, meules à grains, fusaïoles voire parures (bracelets en schiste, perles en pierre ou en terre cuite). Ces structures sont nombreuses en Touraine. Elles sont soit complètement isolées, telle la grande fosse du Néolithique final de Monts, «La Bouchardière» (RANGER 2002), soit perdues au sein de structures plus récentes, ou encore plus ou moins groupées mais en petit nombre et pauvres en vestiges.
Ces structures ne permettent pas de donner une idée de l'ampleur spatiale ni de la configuration des espaces villageois. De plus, plusieurs périodes du Néolithique sont souvent présentes sur ces habitats, comme à La Celle-Saint-Avant (RANGER 2003) ou à Ligueil, et donner aux structures des attributions chrono-culturelles précises est souvent fort malaisé.
Mais, grâce au matériel céramique et, en particulier pour le Néolithique final, aux outils en silex du Turonien supérieur originaire de la région du Grand-Pressigny, il est possible de dessiner une carte relativement dense de l'occupation de la Touraine au Néolithique (carte 4), carte que les sépultures contribuent à enrichir.
Les premières installations villageoises remontent au Néolithique ancien, représenté essentiellement par le groupe de Villeneuve-Saint-Germain (fin 6e - début 5e millénaire), connu bien davantage au nord de la Touraine qu'au sud (carte 2). Dans la première moitié du 5e millénaire, le groupe de Chambon est présent dans l'ensemble de la Touraine et y marque l'apparition des enceintes à fossés (Sublaines). Le Chasséen tourangeau occupe aussi bien les plaines alluviales (La Celle-Saint-Avant) que des éperons barrés (Amboise) (carte 3). À la fin du 4e et au 3e millénaire, le Néolithique récent et le Néolithique final sont encore difficiles à clairement distinguer (carte 4). En effet, les espaces domestiques fouillés sur plus d'une centaine de mètres carrés sont rarissimes, les structures mises au jour sont peu nombreuses et peu caractéristiques, tout comme les vestiges domestiques. De plus, la fragmentation de la céramique, généralement grossière et non décorée, ne fournit pas d'assemblages suffisamment variés et riches pour individualiser avec pertinence des groupes culturels. Ainsi, nous ne sommes aujourd'hui pas encore à même de percevoir les liens qui unissaient éventuellement les ateliers de taille du Néolithique final et les habitats proches.
voir les notices des sites néolithiques (pdf)
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