L'habitat à l'âge du Bronze est attesté par une trentaine de sites ou indices de site. La connaissance que nous avons de ces sites est inégale, en partie tributaire de la localisation des opérations préventives liées aux grands aménagements. La qualité de l'information dépend aussi de la nature de l'opération, selon qu'il s'agit de fouilles extensives, de diagnostics à la pelle mécanique ou de prospections pédestres. Du mobilier découvert hors structure, des fosses isolées, et - plus rarement - des unités d'habitation ont été mis au jour. Selon la typologie des formes de l'habitat à l'âge du Bronze, telle qu'elle est envisagée, par exemple, dans le cadre des travaux sur la vallée de l'Aisne, les occupations ouvertes et dispersées organisent les terroirs (BRUN, PION 1992) : ces établissements, d'une durée d'une ou deux générations, sont tournés vers des activités agro-pastorales. En Touraine, les premières habitations sont documentées à partir de l'âge du Bronze moyen. Il s'agit de bâtiments sur poteaux à une seule nef, de plan rectangulaire ou comportant une abside. Autour des habitations se développent des greniers, ateliers, resserres et fosses d'extraction. De petits silos sont attestés à partir du Bronze final. Les rejets domestiques contenus dans les fosses témoignent des activités qui ont pu s'exercer sur les sites. Les fermes, délimitées par des fossés ou des haies, apparaissent en général dès l'âge du Bronze moyen dans l'ouest de la France (CAROZZA, MARCIGNY 2007), mais ne sont pas attestées en Touraine. Les hameaux, villages et sites de hauteur, sont peu documentés car ils ont rarement été explorés.
Les sites du Bronze ancien (2300-1600 av. n. è.)
Dix-sept sites ou indices de sites sont répertoriés (carte n°1). Deux opérations de diagnostic ont révélé des structures en creux, à La Celle-Saint-Avant et Esvres-sur-Indre. En l'état actuel des connaissances, les habitats sont caractérisés par une ou deux fosses isolées. Les structures sont peu nombreuses et renferment peu de mobilier. Des épandages de mobilier ou des dépressions naturelles ayant piégé des artefacts signalent leur proximité. Seule la présence de céramique domestique permet alors d'envisager l'existence d'un habitat. Plusieurs découvertes de mobiliers isolés, à l'occasion de prospections pédestres, complètent les informations.
Les sites du Bronze moyen (1600-1300 av. n. è.)
Quatre habitats sont répertoriés (carte n°2): hormis le site du Petit Beauséjour à Tours, au nord de la Loire, la céramique témoigne de traits culturels communs avec le groupe des Duffaits, une entité culturelle qui couvre le centre-ouest de la France et se trouve bien documentée notamment en Charente. Deux sites, exceptionnels pour la période, livrent des vestiges de bâtiments d'habitation : Sublaines « Le Grand Ormeau » (FRENEE et al. 2008, FRENEE 2014) et Tours «Le Petit Beauséjour» (FROQUET-UZEL et al. 2008). Il s'agit d'unités composées d'un bâtiment et de deux à trois édifices annexes. Aucune trace de délimitation de l'espace n'a été observée. Une fosse isolée a également été mise au jour à Parçay-sur-Vienne « La Blissière » (PORCELL 2005). Les analyses 14C fournissent un cadre chronologique fiable pour les sites de Sublaines « Le Grand Ormeau », Tours « Le Petit Beauséjour » et Parçay-sur-Vienne « La Blissière ». Plusieurs découvertes de céramiques isolées, comme à Rilly-sur-Vienne, Fondettes ou Pussigny, complètent nos connaissances typo-morphologiques.
Les sites du Bronze final (1300-800 av. n. è.)
Moins d'une dizaine d'habitats sont attribués à cette dernière période (carte n°3). Les niveaux de sol et les foyers des habitations ne sont jamais conservés. L'étape ancienne du Bronze final est attestée par deux sites à Barrou et Chambon. Ces occupations du Bronze final IIa et IIb sont appréhendées sur des surfaces réduites. Elles concernent un petit nombre de fosses et de trous de poteau. Le site de Sublaines a révélé des occupations du Bronze final IIIa et IIIb réparties sur plus de 7 ha : une unité d'habitation, constituée d'un bâtiment rectangulaire à deux nefs et de probables greniers, est datée du Bronze final IIIa ; plus au nord, l'association de fosses à comblement détritique et de plusieurs habitations de même module et greniers groupés pourrait correspondre à un hameau. La faune, principalement domestique, atteste diverses activités : boucherie, consommation, artisanat domestique, rejets de foyers. L'artisanat domestique est représenté par l'activité de filage et de tissage. La fabrication de bracelets en matière organique fossilisée, ainsi que la bourrellerie et la tabletterie, sont avérées sur le gisement. Le site de La Riche a quant à lui révélé deux plans de bâtiments incomplets, un silo et plusieurs fosses réparties sur environ 300 m2 (CORDIER 2009). Les rejets domestiques sont datés de la transition entre le Bronze final IIIb et le Hallstatt ancien.
À Amboise, l'implantation d'un site de hauteur sur le plateau des Châtelliers, lieu possible de centralisation et de redistribution des biens de prestige à l'âge du Bronze, est très probable. Le site et ses environs, malgré l'absence de véritables fouilles d'envergure, livrent depuis le 18e siècle quantité d'objets de l'âge du Bronze final (1300-800 av. n. è.) et notamment un important dépôt d'objets métalliques (CORDIER 2002). La présence de dépôts métalliques importants est fréquemment observée à proximité des établissements fortifiés (MILCENT 2014a). A Sainte-Maure-de-Touraine, l'existence d'un habitat de hauteur fortifié est également présumée. Les découvertes d'objets métalliques (une hache à douille et un bracelet à tampon) y sont toutefois plus modestes (CORDIER 2009).
La configuration généralement dispersée des formes de l'habitat à l'âge du Bronze nécessiterait des grands décapages, qui font défaut en Touraine. Dans l'état actuel des connaissances, les données archéologiques sont conformes à ce qu'on sait de l'organisation des habitats à l'âge du Bronze dans le centre et le nord de la France (BRUN et al. 2005). Le mobilier céramique et surtout métallique (mieux documenté) atteste de multiples relations culturelles, à la fois avec l'Ouest et le complexe atlantique, et avec l'Est et le complexe nord-alpin. Pourtant, la Touraine ne semble pas influencée par le complexe atlantique dans l'architecture des habitations, qui est de type nord-alpin : à la différence du nord-ouest de la France, aucun édifice de plan circulaire n'est encore connu.
Voir aussi :