Vicus, castrum et villa au 6e s. d'après les sources textuelles


Elisabeth Zadora-Rio

Pendant tout le haut Moyen Age et au-delà, jusqu'au 12e-13e s., les documents sont rédigés exclusivement en latin. Les trois termes les plus employés pour désigner l'habitat - vicus, villa et castrum - déjà employés à l'époque romaine, restent en usage tout au long de la période, et les sources écrites ne permettent guère de mesurer la transformation des réalités matérielles qu'ils recouvrent. Leur fréquence relative varie considérablement en fonction de la chronologie et de la nature des sources.

Grégoire de Tours mentionne trente-et-un vici en Touraine au 6e s., et seulement trois villae et deux castra. Ce fait ne reflète pas la fréquence relative des villae, des castra et des vici, mais les intérêts de Grégoire : il nous parle principalement des vici, parce que c'est surtout là que les évêques qui l'ont précédé sur le siège épiscopal de Tours ont construit des églises.

Parmi les vici qu'il mentionne, certains ont pour origine des agglomérations antiques attestées par l'archéologie. C'est certainement le cas d'Amboise et de Mougon (cne Crouzilles), et probablement aussi de Vernou et d'Yzeures. Quelques autres, comme Candes, Loches, Esvres, Langeais, Chinon, ont livré également les traces d'une occupation antique importante. Le restant n'a pas d'antécédent antique connu à ce jour. Dans le cas du vicus de Manthelan, de Luzillé et des deux vici qui portent le nom de Neuillé, qu'on peut identifier avec Neuillé-Pont-Pierre, Neuillé-le-Lierre ou Neuilly-le-Brignon, Grégoire précise qu'ils ont été fondés par les évêques Volusianus, Injuriosus et Baudinus

A travers le témoignage de Grégoire, et celui des conciles de l'époque mérovingienne, seules apparaissent les fonctions religieuses des vici : ils sont tous dotés d'une ou deux églises, et dans le cas de Chinon et Loches, d'un monastère. On ignore tout de leurs éventuelles activités de production. Les ateliers de potiers de Mougon et de Thésée, bien attestés à l'époque gallo-romaine, semblent s'arrêter au 2e s. La seule activité que l'on puisse actuellement rattacher aux vici est la frappe de monnaies. Sur les vingt-huit lieux d'émission monétaires des 6e-7e s. identifiés en Touraine, dix-huit sont mentionnés comme vici par Grégoire de Tours, et huit autres sont attestés comme tels par les inscriptions sur les monnaies mérovingiennes (ZADORA-RIO 2008 : 77-84).

Grégoire mentionne seulement deux castra en Touraine, à Chinon et à Loches, et dans ces deux cas, ils sont associés sous un même toponyme à un vicus.

Si sur le plan de la hiérarchie religieuse, les villae occupent le plus souvent un rang secondaire par rapport aux vici, elles peuvent en revanche abriter des résidences aristocratiques qui étaient des sièges de l'autorité publique et dont la présence n'est pas attestée dans les vici.

Tous les vici du 6e s. connus en Touraine sont devenus des chefs-lieux de paroisse au Moyen Age, puis des chefs-lieux de communes en 1790, à l'exception de Thuré (commune de Saint-Paterne) et de Calatonno, non localisé, qui a disparu ou changé de nom (ZADORA-RIO 2008: 100-104).

Voir aussi :
- Crouzilles, "Mougon" : de l'agglomération antique au village médiéval
- Les agglomérations secondaires gallo-romaines
- Les castra de l'Antiquité tardive et du haut Moyen Age (400-900)

mentions légales | Haut de page

Contact
Sommaire
Auteurs
Glossaire
Bibliographie générale
Recherche