Tours et la Loire


Henri Galinié

La ville a longtemps été localisée sur la seule rive gauche du fleuve. La rive droite n'a longtemps connu qu'une occupation linéaire, bande étroite entre fleuve et coteau, le long d'une route conduisant à Angers et à Orléans. Trois vallons, celui de Saint-Symphorien, celui de la rue Groison et celui de Saint-Cyr donnaient accès au plateau avant le percement de la route royale du 18e s. Cette méridienne a fait basculer l'axe de développement de la ville qui, d'est-ouest, est devenu nord-sud. L'interfluve entre Loire et Cher, large de N km, n'a été urbanisé dans son ensemble qu'à partir du 19e s.

Franchissements

Quatre ponts ont été successivement en usage entre le 1er et le 18e s. pour traverser la Loire. Ils correspondent aux vallons Groison et Saint-Symphorien ainsi qu'à la « Tranchée » comme l'appellent les Tourangeaux.

Les ponts antiques, récemment découverts, datent respectivement du 1er et du 4e s.

Le pont du 1er s. est situé au centre de la ville ouverte. Il est prolongé par ce que l'on considère aujourd'hui comme l'axe majeur de Caesarodunum, où se trouvait le centre civique.

Le pont du 4e s. accompagne le déplacement de la ville, close dorénavant, vers l'est. Il est établi face au centre de la nouvelle Cité où sont réunis les détenteurs de la puissance publique.

A ce pont, dont on ignore la durée du fonctionnement, est substitué, toujours face à la Cité, mais devant son angle nord-ouest, un nouveau pont au 11e s.

Malgré des vicissitudes que rapportent les archives municipales qui apparaissent au 14e s., ce pont fut maintenu jusqu'à la construction de celui du 18e s.

Les ingénieurs royaux tirèrent alors profit de la faible densité d'occupation intercalaire entre les deux pôles urbains de la ville, à l'intérieur d'une très vaste enceinte construite au 17e s. Le tracé rectiligne de la tranchée du 18e s. ne s'appuya pas sur les vallons de la rive droite. Son tracé est artificiel.

La localisation des quatre ponts illustre combien il a été laborieux de structurer une ville dont le centre a été déplacé selon un mouvement pendulaire.

Emprise urbaine

La ville ouverte du 1er siècle a été établie sur une terrasse alluviale de forme grossièrement triangulaire, en pente douce vers le sud-ouest. Son point culminant, de quelques mètres, se trouve être une montille qui, située au nord-est, forme la point du triangle. Ce relief fut mis à profit au 1er s. pour construire l'amphithéâtre. Le triangle, étendu sur quelque 200 ha, est entouré de « boires », chenaux et paléochenaux dans l'interfluve, où s'épandaient les crues.

A quelque distance à l'ouest de l'espace urbanisé antique et médiéval, environ 300 m, se trouvait une jonction entre Loire et Cher.

La Loire au nord, la dépression des boires reliées au fleuve à l'est, largement étendues au sud et à l'ouest de la terrasse, et la jonction Loire-Cher de l'ouest, appelée le ruau Saint-Anne, ont défini l'emprise de la ville pré-industrielle. En effet, l'extension de la ville ouverte du Haut Empire en direction du sud, dans les boires, est restée sans lendemain.

Le trait de rive

Dans l'emprise de la ville pré-industrielle, il est demeuré stable à l'est de la terrasse alluviale, face à la Cité du 4e s., alors qu'il a été profondément modifié au centre et surtout à l'ouest, quand on le compare au tracé des quais actuels, hérités de la fin du 18e s.

Au 1er s., au centre (vers l'actuelle rue Nationale), le trait de rive se trouvait à 150 m à l'intérieur des terres ; à l'ouest (sur l'emplacement de l'ancienne Clinique des Dames Blanches, rue Georges Courteline), il faut compter plus de 200 m. L'avancée dans la Loire a donc été très importante en 2 000 ans.

Les conditions de cette progression dans le lit du fleuve demeurent incertaines. En mobilisant les sources disponibles, quelques jalons peuvent être placés au 10e, au 11e, au 14e, au 17e et au 19e s.

Certes, le rôle majeur joué par le fleuve dans le transport des marchandises apparaît comme une explication de la volonté des habitants de se rapprocher de la rive mais les effets de phénomènes d'origine naturelle sont encore inconnus. Par exemple, un texte du 10e s. contient une allusion au déplacement de la rive gauche vers le nord, au droit de l'église Saint-Julien.

On observe, dans l'Antiquité, la transformation de la grève en pente douce, en berge aménagée et à cette occasion des gains du domaine terrestre sur le domaine fluvial. A partir du Moyen Age, la canalisation des eaux du fleuve pour le rendre navigable toute l'année, alors que son cours naturel le pousse vers la rive droite, peut aussi expliquer une partie des gains. De même, il est possible que des îles aient été rattachées à la rive gauche par des remblayages massifs.

Les effets entrevus du Petit Age Glaciaire des 14e - 18e s. sur les précipitations et la canalisation du fleuve dans les levées restent à mesurer pleinement.

Voir aussi :
- Tours, de Caesarodunum à la ville sub-contemporaine
- L'évolution de la plaine alluviale de Tours au Quaternaire récent

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