Les opérations cantonales de prospection-inventaire du Service régional de l'archéologie du Centre


Aurélie Schneider

avec la collaboration de Pascal Alilaire et Viviane Aubourg (SRA Centre)

La constitution d'un inventaire archéologique a été l'une des missions des services archéologiques de l'Etat dès leur origine (Schneider 2014b). Historiquement, la plupart des informations composant cet inventaire étaient localisées de façon plus ou moins précise. Elles résultaient majoritairement de campagnes de prospection et de l'enregistrement des opérations de terrain (sondages, fouilles), la proportion de données purement bibliographiques étant assez faible. On observait également une grande disparité suivant les grandes périodes chronologiques et les départements, reflet de l'engagement des services et de l'implantation géographique des chercheurs. L'outil ainsi construit par accumulation d'informations fragmentées était certes évolutif et pertinent dans le fond mais il demeurait hétéroclite dans sa forme.

C'est pourquoi, en 1992, le Ministère de la Culture a décidé de donner à l'inventaire archéologique une impulsion nouvelle avec la mise en place de crédits dans les régions. Cet accroissement de moyens a permis d'envisager la réalisation progressive d'un pré-inventaire des sites en région Centre et notamment en Indre-et-Loire. En effet, en 1993, l'Etat et le Conseil Général d'Indre-et-Loire ont signé une convention de développement culturel qui incluait un chapitre «inventaire archéologique», apportant ainsi une aide financière complémentaire. Une convention générale pour l'inventaire archéologique du département est venue consolider ce partenariat au début de l'année 1995.

L'objectif prioritaire de ces opérations d'inventaire en Indre-et-Loire était de contrôler la fiabilité des données existantes, de les homogénéiser et de les mettre en forme. Les opérations ont été menées pendant 10 ans (de 1992 à 2002) sous la direction de Pascal Alilaire et coordonnées au Service régional de l'archéologie par Solange Lauzanne.

Le choix du territoire cantonal s'est imposé car il correspondait au cadre d'étude du service régional de l'Inventaire (service dont la compétence a été transférée aux régions depuis la loi de décentralisation du 13 août 2004 et qui a pour mission de recenser, d'étudier et de faire connaître le patrimoine architectural et mobilier qui présente un intérêt culturel, historique ou scientifique) avec lequel le Service régional de l'archéologie collaborait étroitement. De plus, il représentait un espace suffisamment petit pour que son étude ait lieu dans des délais raisonnables, et aussi suffisamment grand pour permettre une vision plus globale de l'occupation du territoire.

Pour chaque canton, le travail de terrain a été préparé par une analyse sommaire du contexte géologique et géomorphologique de chaque commune, un dépouillement bibliographique systématique, la consultation des archives du Service régional de l'inventaire et de la Conservation régionale des monuments historiques, l'étude des plans cadastraux « napoléoniens » et des autres cartes et plans anciens disponibles, celui des inventaires sommaires des archives départementales et l'examen de missions aériennes de l'IGN. Il s'agissait de recueillir la totalité des informations accessibles, à commencer par les données déjà enregistrées dans les fichiers et archives du Service régional de l'archéologie, de les vérifier systématiquement au sol afin de les identifier, de les localiser et de les cartographier le plus précisément possible.

Outre la vérification au sol des sites ou indices, quelques secteurs dépourvus d'informations ont été prospectés dans chaque commune. Afin qu'aucune zone du territoire communal ne soit totalement négligée, les prospections ont concerné au moins une parcelle par section cadastrale. A cela s'est ajoutée une exploration plus systématique de certains types géomorphologiques tels que les fonds de vallées, les rebords de plateaux ou les zones proches de cours d'eau ou de vallées sèches.

Le recensement a pris en compte tous les sites et indices de sites de la Préhistoire à la fin du Moyen Âge. Il a inclus également un repérage des constructions en élévation de la période moderne, notamment quand elles prolongeaient une occupation antérieure, quand elles étaient menacées de disparaître ou lorsqu'elles présentaient des caractéristiques architecturales intéressantes. Il s'est étendu, pour la période contemporaine, à l'enregistrement des écarts désertés ou réduits à l'état de ruine et il a englobé aussi les sites « d'archéologie industrielle ».

Ces campagnes étaient donc avant tout des opérations de contrôle au sol, mais elles constituaient aussi des opérations de recensement à part entière. Elles ont permis un réel progrès de l'inventaire archéologique du département d'Indre-et-Loire tant d'un point de vue quantitatif que d'un point de vue qualitatif. Actuellement, le Service régional de l'archéologie dispose d'une documentation solide, systématique et hiérarchisée sur un tiers des cantons du département.

Dans chacun des cantons, le contrôle sur le terrain a multiplié de manière notable le nombre de sites connus (le nombre de sites recensés sur chaque commune a été au moins doublé), et a permis d'apprécier le potentiel archéologique de chaque site de façon bien plus précise qu'un travail purement documentaire. Ces prospections-inventaires ont mis en évidence des points forts de l'occupation du sol et nous conduisent aujourd'hui à avoir une compréhension plus globale des territoires concernés. Parallèlement, des risques de destruction ont pu être identifiés afin de remédier au plus vite à certaines situations d'urgence.

Malgré l'arrêt des prospections cantonales en 2002, le travail de nombreux bénévoles et de programmes de recherche de prospections diachroniques ou thématiques induit une augmentation constante des données. L'apport des opérations d'archéologie préventive a également considérablement augmenté le corpus des sites enregistrés depuis la mise en place de la nouvelle loi sur l'archéologie (en 2001, avec des modifications en 2003 et 2004).

En date du 26 mai 2010, 8881 entités archéologiques sont recensées sur le département d'Indre-et-Loire dans la base de données Patriarche. L'exploitation de cette base constitue donc un point de départ solide à toute étude d'un territoire. Sur des zones très bien documentées comme les 10 cantons prospectés d'Indre-et-Loire, l'objectif serait aujourd'hui d'inscrire les données au sein d'un espace, d'une étude plus globale des contextes environnementaux. Il est en effet nécessaire d'expliquer les phénomènes de concentrations, de vides, de disparités, puisque les opérations d'archéologie préventive de grande envergure tendent à prouver que, même dans des zones bénéficiant d'un inventaire archéologique très détaillé, seulement 1/10 des sites environ sont répertoriés. L'exploitation des données de la « carte archéologique » revêt alors de multiples facettes encore peu exploitées.

Liste des participants aux différentes campagnes de pré-inventaire (pdf)

Voir aussi :
- Les lieux mentionnés dans les sources écrites médiévales entre la fin du 4e et la fin du 12e siècle
- Historique des recherches archéologiques
- L'inventaire archéologique et la base de données PATRIARCHE du Ministère de la Culture

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